----------
Affichage des articles dont le libellé est Démarche artistique. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Démarche artistique. Afficher tous les articles

Lyon, le 10 mars 2014



 Poétée
 
         Que fais-tu, poète ?
       - Je tiens le monde à l’œil.

        Pourquoi, poète ?
      - Si je ne papillonnais pas autour du monde, lui offrant mes couleurs et butinant ses parfums comment nous apprivoiserions-nous ?

       A quoi cela te sert-il poète ?
      - Le monde me permettrait-il de l’embrasser de mes mots si nous n’étions amis ?

       A quoi cela sert-il poète ?  
      - Qui la liberté sert-elle ?

       Oui mais, poète, tes poèmes changent-ils quoi que ce soit à la course du monde ?
      - Qui sait ? 
         Ne présume pas de la fécondité. 
         La liberté est matrice, à un point que nul ne peut imaginer. 
         Regarde le faon lorsqu’il sort du bois en gambadant : peux-tu prédire où il posera ses sabots dans la seconde à venir ? Nul ne le sait, même pas sa mère…
                                                                                                                     © Michèle Rodet
-
-

Lyon, le 24 juillet 2012


Passages

La poésie m’attire. J’aime la lire. J’aime d’avantage encore l’écouter, incarnée par une voix et ses couleurs, une scansion, un souffle… une présence.
J’aime aussi en écrire. Les formes, nombreuses, dans lesquelles elle se coule,  me permettent de donner libre cours à mon imaginaire dont les surgissements sont multivoques. 
Ah, le plaisir de jouer des mots, des rythmes et des silences comme un musicien joue de son instrument ! Et que dire de la joie de façonner des images, de ménager des entre-deux - autant de portes ouvertes pour que l’imaginaire d’autrui entre en correspondance avec le mien, autant de passages pour que des voix secrètes se faufilent jusqu’à nos oreilles…

 
Rue de l'Oratoire  -  Chalon sur Saône (France)
Cette année, le haïbun s'est joint à mes autres "instruments" de poésie. C'est une forme traditionnelle d'origine japonaise, plutôt courte. Sa principale caractéristique ? Mêler le récit et la poésie, que l'on préfère brève, de sorte que le haïku y trouve naturellement sa place. 
Les premiers haïbuns connus sont des récits de voyages. Aussi cette forme m'est-elle apparue comme pouvant faire coexister deux voix dans le même espace : celle du récit de voyage en surface et celle de l'âme dans la profondeur à travers de la poésie.

    Le haïbun, c’est le chant et la voie.
    L’accord entre deux…
    La trace d’un passage, de passages…

    Passage est d'ailleurs le thème choisi par les rédacteurs de l'Echo de l'Etroit Chemin n°4, la revue numérique publiée sur le site l'Etroit Chemin, dédié au haïbun. Le passage s'y décline en haïbun et sous divers aspects et tonalités...


-

Lyon, le 6 février 2011 - Exposition : prolongation !

-
© Michèle Rodet : Châlheur - Soie incarnat crochetée,
montée sur baguette de bois - par dessous, tapis afghan !


L'exposition de quelques-unes de mes oeuvres au Golshane est prolongée jusqu'à la fin février 2011.

Je peux ainsi présenter un peu de mon oeuvre et rencontrer les personnes qui, d'une façon ou d'une autre, s'intéressent à mon travail.




C'est aussi pour tout un chacun la possibilité de me rencontrer. Alors, si vous le souhaitez, contactez-moi et nous conviendrons d'un rendez-vous.

Le GOLSHANE - est situé au pied de la Croix-Rousse, au coeur de Lyon, à deux pas des Terreaux : 126, montée de la Grande-Côte dans le 1er arrondissement.


Golshane signifie en persan : Jardin de Roses.

Lyon, le 8 octobre 2010 – Commencer à apparaître


© Michèle Rodet - Le 5ème élément
(2008) Détail
      Pouvoir donner un visage à ce qui émerge de l’invisible : prêter formes langagières ou figures à sa (sur)face lors de son apparition n’est-il pas d’abord question de saisie, de capacité du corps et de la pensée à approcher, soutenir, accueillir et articuler des réalités qui échappent, a priori, aux sens et à la raison ?

      Il est arrivé ou il arrivera à chacun d'entre nous de découvrir que des formes inconnues étaient existantes dans l’invisible, dont nous ignorions à peu près tout en ce qui nous concernait, qui apparaissent sous l’aspect d’une révélation furtive - sitôt entrevue, sitôt disparue - ou d’un dévoilement permanent et tenace ; et entre ces deux termes, naturellement, toute une palette de nuances.

     La littérature et les arts ont été pendant des siècles les chantres de cet événement. L’écrivain classique disposait son lecteur à être particulièrement attentif à l’avènement de ce « quelque chose » en introduisant dans le fil de son récit la formule "Kai egeneto" que l’on traduit par : Et il arriva (que)… Cette expression, bien que formelle, était une alerte : elle prévenait le lecteur que même si certaines choses étaient passées sous silence, elles avaient bel et bien eu lieu. Et circulé. Depuis quelle(s) source(s), comment, pourquoi et dans quel but ? Mystère. Mais ce qui est sûr, c’est que cela s’était passé et que c’était arrivé !

© Michèle Rodet - Le 5ème élément (2008)
Détail ruban : ribambelle de cavaliers antiques
      Car lorsque la forme apparaît, il est réellement arrivé quelque chose. Littéralement. Dans nos histoires propres, il n’y a malheureusement pas de narrateur complice et bienveillant pour nous faire signe, de sorte que nous accusions réception de ce supplément avec l’aisance épique des antiques héros. Généralement, être confronté à l’apparition d’une forme inattendue nous prend de court et nous dépasse de manière que nous en sommes nous-mêmes surpris. Au point d’être mis hors de soi, exalté, paniqué ou d’en perdre certaines perceptions sensorielles, etc. Notre corps porte, bien avant notre raison, témoignage de ce qui nous est arrivé.

© Michèle Rodet - Le 5ème élément (2008)
Rubans sur toile de lin tendue sur châssis de bois
       Quelles que soient nos réactions au moment où émerge une forme inconnue sur fond d’invisible, nous sommes sommés par ce surplus. Ce quelque chose nous affecte si bien que nous devenons parfois irritables, selon la formule convenue, et que le trop plein non encaissé se décharge en colère ; laquelle atteste de notre impuissance à changer quoi que ce soit à ce qui est arrivé ainsi que de notre impossibilité à déployer les conséquences qui, forcément, ne manqueront pas de bouleverser tous les petits arrangements avec la vie - et la mort - que nous avions à grand peine inscrits aux registres de nos assurances, contrôles, sécurités, sûretés et autres maîtrises…

      Alors, du milieu de cet entre-deux – seuil ouvert aux quatre vents – apparaît l’inconnu résidant aux fondements de l’écriture poétique et de la création artistique. Inconnu élevant ou orientant nos regards vers le ciel, ainsi que « le serviteur du visible » qu’est Philippe Jaccottet l'évoque dans Paysages avec figures absentes :

     « En fait, de toutes mes incertitudes, la moindre (la moins éloignées d’un commencement de foi) est celle que m’a donnée l’expérience poétique ; c’est la pensée qu’il y a de l’inconnu, de l’insaisissable, à la source, au foyer même de notre être. Mais je ne puis attribuer à cet inconnu, à cela, aucun des noms dont l’histoire l’a nommé tout à tour. Ne peut-il donc me donner aucune leçon – hors de la poésie où il parle -, aucune directive, dans la conduite de ma vie ?
     Réfléchissant à cela, j’en arrive à constater que néanmoins, en tout cas, il m’oriente, du moins dans le sens de la hauteur ; puisque je suis tout naturellement conduit à l’entre-voir comme le Plus-Haut, et d’une certaine manière, pourquoi pas ? comme on l’a fait depuis l’origine, à le considérer à l’image du ciel
    Alors il me semble avoir fait un pas malgré tout. »
                                                   (Editions Poésie/Gallimard Poche, 1976, p.179-180)

Lyon, le 20 mars 2010 - Préparatifs

@
Première page oblige, pourquoi avoir nommé ce blog  TEXTES  ET  TOILES ?

Parce que les textes et les toiles entretiennent de nombreuses relations et parce que… j’apprécie les jeux de mots.
Il y a une relation « générative » entre les mots « texte » et « tissu ». Littéralement. Le mot « texte » français a été tiré du mot « tissu » en latin. Comme un enfant de sa mère…
Comment dit-on « tissu » en latin ? Textus !
Et que signifie le mot latin textus ? Tissé, entrelacé, tressé, formé par assemblage de parties, en tant que participe passé ; et en tant que nom : enlacement, tissu, contexture, trame, entrelacement, contexture (de style), enchaînement, structure (d'un récit), liaison (des idées). Et aussi : suite, récit, exposé - texte, contenu, teneur.

La relation qui noue le tissu et le texte est au cœur de ma création : j’écris des textes-tissus et je crée des toiles-textes.

Le texte et la toile ont un autre un point commun - parmi encore de très nombreux - celui de l’entrelacs. La logique de l’entrelacs – dessus/dessous - est à la base de la notion de tissu et de texte. Les fils d’une toile tiennent du simple fait de l’entrecroisement des fils de chaîne et des fils de trame. Un texte est construit de la même façon : au lieu des fils, des phrases, des pensées et des histoires… La trame des récits se noue en d’infinis entrelacements d’intrigues sur la chaîne des images, métaphores, pensées…

A cela s’ajoute mon goût pour la couleur et la lumière, de sorte que mes toiles-textes racontent des histoires sans mots mais avec des… motifs. Tout de formes, de textures et de couleurs…
Mes toiles content des histoires puisées dans les nombreux textes de littérature et de philosophie qui ont élus domicile en moi. Lorsqu'ils me visitent, ils se re-forment et je les dépose sur des toiles en tissu qui, telle des pages blanches, se prêtent à l’écriture. Les motifs qui me viennent aux doigts sont alors autant de filets d’encre, rendant visibles les fils d’idée, relations et voies au travail dans les profondeurs. Ainsi se manifestent les lettres et les cartes réfléchissant ma rencontre - et mes relations - avec les anciens et l’inspiration du jour…

Mes textes relèvent du même mouvement : ils sont l’autre versant de mon œuvre plastique. Car, bien que dérobées, le monde aussi a ses lettres et ses cartes. J’éprouve plaisir à les lire… Leur écriture est mystérieuse, d’autant plus que, fractionnée, elle est disséminée au secret de chacun d’entre nous. Ecrire me permet de mettre en lumière, autant que faire se peut, les fragments dont je suis dépositaire. Et de les partager…